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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/95

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refroidiſſement, le Comte en chercha les raiſons, & s’attacha à la plus cruelle ; il penſa que changeant de goût, en changeant d’état, je donnois à l’amour de ma liberté, la préférence ſur tout autre. En proie à ce ſoupçon, il ne le communiqua même pas à ſon pere. Ce fut un vautour dont il ſe laiſa dévorer…

Mes tourments ſecrets différoient peu des ſiens. Des torts imaginaires en produiſoient de réels : nous étions toujours en pointillerie, en contradiction ; & chacun ſe perſuadant avoir les plus juſtes ſujets de plainte, c’étoit à qui ne romproit pas la glace.

Comme nous ne nous rencontrions que chez ma mere, que nous ne prenions aucun ſoin de nous déguiſer, elle s’apperçut aiſément de notre méſintelligence. Eſt-ce que le Comte ne vous aime plus ? me demanda-t-elle un jour. Je détournai le viſage ; … mes larmes firent ma réponſe. — Comment, vous pleurez ! vous jouez l’Amante délaiſſée Seroit-il vrai que vous en fuſſiez là ? Je crois qu’oui, dis-je à demi-voix. — Eh ! qu’eſt-ce qui vous le fait croire ? Ma confiance en Madame de Rozane n’alloit pas juſqu’à m’arracher la vérité toute entière. J’accuſai le Comte de négligence, de ne m’avoir pas dit un mot ſur l’intérêt qu’il devoit prendre à ma nouvelle ſituation, de