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Page:Bonaparte - Œuvres littéraires, tome 1, 1888.djvu/128

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ont rendu hommage en excluant de la société ceux qui ne possédaient rien ou ne payaient pas telle imposition. Pourquoi cette seconde justice ? C’est que l’homme que les lois n’ont pas mis à même d’être heureux ne peut être citoyen ; c’est que l’homme qui n’a point d’intérêt au maintien de la loi civile en est l’ennemi. Il eût fallu lui assurer une portion de propriété, afin de l’y intéresser, de l’attacher ; à défaut de cela, il a fallu l’exclure comme un être avili, hébété, et comme tel incapable d’exercer une portion de la souveraineté… Voila la raison politique, sans doute… Mais aux yeux de la morale ! Mais aux yeux de l’humanité ! Quand je verrai un de ces infortunés transgresser la loi de l’État, être supplicié, je me dirai : C’est le fort qui victime le faible. Il me semble voir l’Américain périr pour avoir violé la loi de l’Espagnol.

Après avoir persuadé au législateur qu’il doit s’occuper également du sort de tous les citoyens dans la rédaction de sa loi civile, vous direz au riche : Tes richesses font ton malheur ; rentre dans la latitude de tes sens ; tu ne seras plus ni inquiet, ni fantasque. Combien de jeunes ménages deviennent méchants parce qu’il leur manque ce qui produit en toi cette inquiétude ! Tu as trop et eux pas assez. Votre sort est égal, avec la différence que toi, plus sage, pourrais y remédier, au lieu qu’eux ne peuvent que gémir !… Homme froid, ton cœur