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Page:Bonaparte - Œuvres littéraires, tome 1, 1888.djvu/133

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ne faire que d’entrer, il est déjà l’heure de l’aurore : elle entre par les fenêtres, la pâleur du matin succède aux ténèbres de la nuit. Vous vous en apercevez enfin pour vous retirer ; mais vous y êtes resté six heures ! Si j’eusse pu écrire vos pensées, qu’elles intéresseraient le moraliste !

La curiosité, mère de la vie, vous fait-elle embarquer pour la Grèce, êtes-vous jeté par les courants à l’île de Monte-Cristo : deux heures vous restent ; à la nuit vous cherchez un refuge ; vous avez parcouru ce petit rocher ; vous vous trouvez sur une hauteur, au milieu des débris d’un vieux monastère, derrière un pan de mur couvert par le lierre et le romarin ; vous faites dresser votre tente ; le mugissement rauque des vagues qui se brisent sur les rochers, car le vaste gouffre des mers vous environne, vous représente l’idée de cet élément terrible pour le faible passager. Une légère toile et un mur de plus de quinze siècles vous abritent ; vous êtes agité par l’agitation du sentiment.

Êtes-vous à sept heures du matin dans vos bosquets fleuris, ou dans une vaste forêt pendant la saison des fruits ; sommeillez-vous dans une grotte environnée des eaux des Dryades, dans le fort de la canicule ? Vous serez seul à passer des heures entières, sans pouvoir vous en arracher, ni soutenir les discours du fâcheux qui viendra vous importuner.

Il n’est point d’homme qui n’ait éprouvé la dou-