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Page:Bonaparte - Œuvres littéraires, tome 1, 1888.djvu/149

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intrépide peuple, revenu de son étourdissement, se fût ressouvenu que la mort n’est qu’un des états de l’âme, mais que l’esclavage en est l’avilissement ; elle se serait accomplie… Inutiles recherches ! Dans un instant tout est changé. Du sein de la nation que gouvernaient nos tyrans a jailli l’étincelle électrique : cette nation éclairée, puissante, généreuse, s’est souvenue de ses droits et de sa force ; elle a été libre et a voulu que nous le fussions comme elle. Elle nous a ouvert son sein : désormais nous avons les mêmes intérêts, les mêmes sollicitudes ; il n’est plus de mer qui nous sépare.

Parmi les bizarreries de la révolution française, celle-ci n’est pas la moindre. Ceux qui nous donnaient la mort comme à des rebelles sont aujourd’hui nos protecteurs ; ils sont animés par nos sentiments. — Homme ! homme ! que tu es méprisable dans l’esclavage, que tu es grand lorsque l’amour de la liberté t’enflamme ! Alors tes préjugés se dissipent, ton âme s’élève, ta raison reprend son empire… Régénéré, tu es vraiment le roi de la nature.

À combien de vicissitudes, Monsieur, sont sujettes les nations ! Est-ce la Providence d’une intelligence supérieure, ou est-ce le hasard aveugle qui dirige leur sort ? Pardonne, ô Dieu ! mais la tyrannie, l’oppression, l’injustice dévastent la terre, et la terre est ton ouvrage. Les souffrances, les soucis sont le partage du juste, et le juste est ton image. Ces amères