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Page:Bonaparte - Œuvres littéraires, tome 1, 1888.djvu/148

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de leur ambition, la victime de leur politique et de sa propre opiniâtreté… Vous l’avez vu prendre les armes, secouer l’atroce gouvernement génois, recouvrer son indépendance, vivre un instant heureux ; mais, poursuivi par cette fatalité irrésistible, il tomba dans le plus insupportable avilissement. Pendant vingt-quatre siècles, voilà les scènes qui se renouvellent sans interruption : mêmes vicissitudes, même infortune, mais aussi même courage, même résolution, même audace. Les Romains ne purent se l’attacher qu’en se l’alliant ; des essaims de Barbares l’assaillirent ; ils s’emparèrent de ses champs, incendièrent ses maisons ; mais il sacrifia son caractère de propriétaire à celui d’homme ; il erra pour vivre libre. S’il trembla devant l’hydre féodale, ce fut seulement autant de temps pour la connaître et pour la détruire. S’il baisa en esclave les chaînes de Rome, guidé par le sentiment de la nature, il ne tarda pas à les briser ; s’il courba enfin la tête sous l’aristocratie ligurienne, si des forces irrésistibles le maintinrent vingt ans soumis au despotisme de Versailles, quarante ans d’une guerre opiniâtre étonnèrent l’Europe et confondirent ses ennemis. Mais vous qui avez prédit à la Hollande sa chute, à la France sa génération, vous aviez promis aux Corses le rétablissement de leur gouvernement, le terme de l’injuste domination française.

Votre prédiction se serait accomplie lorsque cet