Page:Bonaparte - Œuvres littéraires, tome 1, 1888.djvu/258

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Après plusieurs moments employés à nous reconnaître, l’on sut que je venais d’Avignon, et que j’étais militaire. Les esprits de mes convives, qui avaient été toute la semaine fixés sur le cours du négoce qui accroît les fortunes, l’étaient dans ce moment sur l’issue des événements présents, d’où en dépend la conservation ; ils cherchaient à connaître mon opinion, pour, en la comparant à la leur, pouvoir se rectifier et acquérir des probabilités sur l’avenir, qui nous affectait différemment ; les Marseillais surtout paraissaient être moins pétulants ; l’évacuation d’Avignon leur avait appris à douter de tout. Il ne leur restait qu’une grande sollicitude sur leur sort. La confiance nous eut bientôt rendus babillards et nous commençâmes un entretien à peu près en ces termes :

    les portes de cette ville, fut repoussé par les Marseillais qui l’occupaient et qui avaient du canon de douze, de seize et de trente-six, tandis que sa propre artillerie ne consistait qu’en deux pièces de huit et quelques-unes de quatre. Pendant qu’il se mettait en retraite, les canons des Marseillais qui étaient placés au château d’Avignon, lequel est situé sur un rocher, cessèrent leur feu, et Carteaux ne savait à quoi attribuer ce silence, lorsqu’on vint l’avertir sur le soir que les Marseillais évacuaient eux-mêmes la ville et se retiraient sur Aix.
    » Il apprit bientôt la cause de cette retraite inattendue. Une colonne de l’armée de Carteaux, ayant suivi la ligne droite du Rhône, était entrée sans résistance à Villeneuve, séparé d’Avignon seulement par le fleuve. Le lieutenant qui commandait l’artillerie de la colonne (Bonaparte) fit placer ses deux pièces de quatre de façon à découvrir la plate-forme du rocher d’A-