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Page:Boucher de Perthes - Voyage à Aix-Savoie, Turin, Milan, retour par la Suisse.djvu/95

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mère de l’entêtement, mène à la stupidité que bien des gens aussi ont considérée comme le comble de la perfection.

Heureux les pauvres d’esprit !
Dans la Bible on peut le lire.
S’appuyant sur cet on-dit,
Maint imbécille s’admire.
Mais songez-y, bonnes gens,
Comprenez ici le maître :
Pauvre d’esprit on peut être
Sans l’être aussi de bon sens.

Notre Seigneur, bien certainement, ne l’entendait qu’ainsi. Il ne pouvait dire à un peuple intelligent, qu’il voulait instruire ou rendre plus intelligent encore : bouchez-vous les oreilles et restez des ânes si la nature vous a faits tels. La simplicité d’esprit n’est pas l’absence de l’esprit, ni même sa faiblesse, mais bien sa droiture, comme l’on dit celle du cœur. Ensuite, je conviens que tous les esprits ne sont pas de bon aloi, et j’en connais que le maître ne pouvait souhaiter à ses disciples,

Car il est, quoi qu’on en dise,
Certaine sorte d’esprit,
Soit parlé, soit manuscrit,
Dix fois pis que la sottise.

En quittant Brera, je vais voir une exposition de peintures qui avait lieu dans le même palais. Comme elle était publique, j’y entrai sans la moindre difficulté ; mais je n’avais pas fait vingt pas que je m’aperçus que j’étais l’objet, de la part des gardiens, d’une attention toute particulière, et d’une attention qui n’avait rien de flatteur. Cette disposition semblait avoir gagné les promeneurs : tous ceux devant lesquels je passais me