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Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/170

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rendu le sommeil que j’ai perdu depuis si longtemps, mais, je le crois enfin, pour jamais. À peine ai-je dormi dix nuits depuis que je t’ai quittée et depuis dix jours à peine ai-je dormi dix heures. Mais qu’importe, pourvu que cela me mène jusqu’au moment de te revoir et de te serrer dans ces bras qui se ressouviennent si bien de ta jolie taille et de te baiser avec ces bonnes grosses lèvres qui y prennent tant de plaisir. J’attends cette Cousine dans huit ou dix jours ; mais combien d’attentes trompées surtout dans les occasions les plus intéressantes ! N’importe, espérons, car c’est toujours ce qu’il y a de mieux à faire en attendant mieux.


Ce 22. — Ma santé est toujours douteuse ; je fais ce que je puis pour ne me point laisser abattre, mais des jours passés à souffrir et des nuits à veiller n’amènent rien de bon. Tant que je le pourrai, je me défendrai contre la maladie et surtout contre la médecine, et, s’il faut succomber, mon corps succombera avant mon esprit et mes forces avant mon courage. La mauvaise saison, quoique sur sa fin, est pire qu’elle n’a encore été, les chaleurs sont excessives, les vents n’ont pas la force de balayer l’air, les pluies ne viennent plus nous rafraîchir, mille insectes inconnus dont plusieurs très venimeux nous attaquent de toute part et les plus imperceptibles sont les plus cruels : ils ressemblent aux ennemis obscurs qui vous déchirent sans que vous puissiez les connaître. Encore quelques jours et cela changera, encore quelques autres jours et je serai loin de tout cela, et puis encore quelques autres et je te verrai.


Ce 23. — Cette Cousine si désirée ne paraît pas