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Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/89

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ton. Il m’est impossible de n’être pas touché jusqu’au fond de l’âme de la perte de cette excellente tante, qui m’a tant aimé et tant regretté, qui disait toujours à Mme de Lauzun : « Vous le reverrez, vous, mais moi je ne le verrai plus. » Enfin, ma fille, tu seras belle-mère et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre toi. Je n’ai que le temps d’y applaudir et de t’embrasser, en te conjurant de ne point faire de folies aux eaux de Plombières, qui sont bien plus actives que celles d’Aix-la-Chapelle. Adieu, mon enfant, il faut te quitter pour des lettres d’affaires, pour des procès-verbaux, pour des ordres d’embarquements, etc., car le vaisseau qui portera ma lettre part demain, et j’ai ma chambre pleine de papiers que je n’ai point encore lus. Encore s’ils valaient tes lettres, mais comme ils sont d’une autre écriture, ils ne les valent sûrement point, car je défierais Mme de Sévigné, Mme de Lambert et Mme Du Deffant réunies d’entrer en lice. Adieu donc, j’ai des affaires par-dessus les yeux. C’est tout ce que je puis faire que de les élever jusqu’à ton portrait pour te remercier. À propos de portrait, j’en attends un qui ne vient pas et tu ne me parles plus de celui que tu dois avoir reçu.


Ce 6 mai. — Me voici enfin délivré de toutes les affaires dont je me suis trouvé accablé entre mon arrivée et le départ de la Dordogne. Elles avaient choisi, comme elles font toujours, le temps où j’étais le moins en état de m’y livrer, car j’arrivais d’un long voyage, mon esprit et mon corps étaient encore tout étourdis du bateau, et, au milieu des soins qui m’occupaient, j’étais vexé par un essaim d’importuns, qui bourdonnaient et sifflaient à mes oreilles comme