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Page:Boulain - La Fontenelle, Vie du partisan ligueur, 1895.djvu/96

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la fontenelle

tisan habile, il avait une très grande valeur, mais il était plus habitué de la cour que des camps… Navarre l’avait distingué à la bataille de Courtras, l’avait fait chevalier de ses ordres, lui avait promis de le nommer grand-maître de l’artillerie, aussitôt que cette place deviendrait vacante… Le Béarnais l’avait envoyé en Cornouaille, avec tous pouvoirs ; il savait que le maréchal d’Aumont l’avait laissée peu affermie dans l’obéissance, et l’on voulait savoir à quoi s’en tenir.

Avant de se rendre à Quimper, il passa quelques jours à Rennes, comme tous les autres grands seigneurs de l’époque, il était joueur. Dans cette ville il avait contracté une forte dette de jeu. Chacun le savait, et lui aussi était désireux d’éteindre ce que l’on appelle une dette d’honneur. Comme la ligue était à sa fin, il répugnait à de Saint-Luc, de livrer à la justice, un homme comme La Fontenelle déplorerait les cruelles expéditions de sa jeunesse, et mettre le roi de l’ile Tristan, entre les mains de la justice du parlement, c’était l’envoyer à une mort certaine : bien que dans tous les partis, il y eut à se reprocher bien des écarts, mais pas d’aussi grands. Un motif existait bien, mais personnel de jalousie : La Fontenelle était le cousin de Lavardin, et celui-ci, malgré les promesses du roi, avait pris la place promise de grand-maître de l’artillerie… Cette vengeance personnelle était indigne d’une âme noble et loyale comme celle de Saint-Luc… en vain l’aurait-on fait valoir.

Songeant cependant aux souffrances de la Cornouaille, les sentiments généreux qu’il éprouvait, venaient lutter contre des sentiments de rigoureuse justice… Son premier mouvement avait été de remettre le jeune partisan en liberté… N’avait-il pas lui aussi rendu la liberté à Du Granec.