Aller au contenu

Page:Bourget - Le Disciple.djvu/284

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
283
LE DISCIPLE

qui annonçait l’arrivée de Mlle de Jussat avec sa mère, « Naturellement, » gémissait l’hypocondriaque, « elle a voulu venir, sans penser que je n’ai pas besoin de ces émotions-là. »

Le marquis me parlait de la sorte à deux heures de l’après-midi. Je savais, pour l’avoir pris à mon retour du voyage où je vous ai connu, que le train de Paris part à neuf heures du soir et arrive à Clermont vers cinq heures du matin. Le temps de monter en voiture, Mme de Jussat et Charlotte seraient au château avant dix heures. Je passai une soirée et une nuit affreuses, dépourvu maintenant de cette tension philosophique, hors de laquelle je flotte, créature sans énergie, au gré d’impressions nerveuses. Le bon sens m’indiquait pourtant une solution bien simple. Mon engagement finissait, comme je vous l’ai dit, le 15 octobre. Nous étions au 5 de ce mois. L’enfant entrait en pleine convalescence. Il avait auprès de lui sa mère et sa sœur. Je pouvais retourner chez moi sans scrupule et sous le premier prétexte venu. Je le pouvais et je le devais, — pour ma dignité autant que pour mon repos. Au matin de cette nuit d’insomnie, j’avais pris cette résolution. J’allai jusqu’à en toucher un mot au marquis tout de suite ; il ne me laissa pas lui parler, tant il était agité par l’arrivée de sa fille :

— « C’est bon, » me dit-il, « plus tard, plus