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Page:Bréhier - Les Thèmes actuels de la philosophie, 1951.djvu/102

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Mais alors l’ontologie dépasse l’étude de l’existence humaine.

Supposez au contraire que cette sortie de l’existence, ce survol au-dessus de mon existence soit considéré comme un leurre, alors tout ce que j’appelais ma destinée et qui m’élevait au-dessus de moi-même devient affaire de vie quotidienne et colle à mon existence propre ; nul destin ne m’est imposé ni même proposé ; j’ai la liberté d’être ce que je veux. L’ontologie se borne alors à l’existence humaine, à ma propre existence, du moins l’ontologie phénoménologique, celle qui décrit simplement le donné. La révolte, la nausée, voilà le sentiment que produira le faux idéalisme qui nous masque la réalité à nous-même et aux autres.

L’être et le néant de M. Sartre, qui contient tant d’analyses précises et de haute portée, peut se lire comme l’histoire de la série des déceptions que le philosophe rencontre dans cette recherche de l’être.

Première déception : la connaissance de soi-même par réflexion est considérée, par la philosophie française en particulier, comme la source principale de la métaphysique. Or, que nous donne-t-elle réellement ? À vrai dire le néant et le vide. La réflexion, dit-on, est spontanéité ; mais dès que la spontanéité veut se poser comme telle, elle devient un être en soi et cesse d’être