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Page:Bréhier - Les Thèmes actuels de la philosophie, 1951.djvu/101

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l’angoisse du néant qui l’enserre, ne comprenant ni pourquoi ni comment il en est sorti et voyant son existence faite uniquement pour la mort qui l’y replongera.

Les livres traitant de pareils sujets (et il en est beaucoup notamment dans la littérature des sermonnaires) portaient autrefois des titres tels que : « Du sens (ou du non-sens) de la vie », et ils appartenaient à la morale plutôt qu’à l’ontologie. M. Sartre a d’ailleurs indiqué, dans un livre qui porte ce titre que « l’existentialisme est un humanisme ». Il faut donc, je crois, pour bien comprendre l’existentialisme, chercher pourquoi il a identifié cette étude de l’homme à l’ontologie.

Il semble que l’existentialisme est un des symptômes les plus clairs de l’écroulement doctrinal qui caractérise notre époque. Donner un sens à la vie, c’est considérer notre propre vie, dans sa conduite et dans sa direction, comme le moment d’un tout plus vaste qui lui donne sa tâche et comme sa part de collaboration. Il faut par conséquent sortir en quelque manière de son existence pour la voir comme baignée dans une réalité plus ample, que cette réalité soit l’humanité, la famille, la patrie, la science ou tout autre fin. Il nous faut nous sentir enserrés par la réalité, non par le néant ; c’est ainsi seulement que l’homme a une destinée.