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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/43

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AURORA FLOYD

mes. Quel homme sans soin ! il laisse toujours traîner ces choses-là.

— Voulez-vous que je vous aide, chère madame Mellish ?

— Oh ! non, merci.

— Mais permettez-moi, je vous prie. J’aime tant les armes à feu en vérité, il y a bien peu de chose dans l’art ou dans la nature qui, sainement considéré, ne soit pas…

— Vous feriez mieux de chercher M. Mellish et de vous assurer si le Colonel dîne ici, madame Powell, c’est mon avis, interrompit Aurora en fermant les boîtes à pistolets et les remettant à leurs places habituelles.

— Oh ! si vous désirez être seule, certainement, — dit la veuve en jetant un regard furtif sur Aurora penchée sur les revolvers.

Puis elle sortit sans bruit.

— À qui parlait-elle ? — se demanda Mme Powell ; — j’entendais sa voix, mais non celle de l’autre personne. C’était sans doute M. Mellish ; et cependant il n’est généralement pas aussi tranquille.

Elle s’arrêta pour regarder par une fenêtre du corridor et trouva la solution du problème qu’elle cherchait, dans la pesante personne de l’idiot qui s’éloignait dans la direction de la loge de l’entraîneur. Les facultés de Mme Powell étaient en vérité par trop cultivées, et sa vue s’étendait, en réalité comme au figuré, beaucoup plus loin que celle de la plupart des autres personnes.

Elle ne put trouver Mellish nulle part dans la maison, et en questionnant plusieurs domestiques, elle apprit qu’il était allé voir l’entraîneur, qu’une indisposition retenait au lit.

— En vérité ! — dit la veuve ; — alors je crois que je ferai bien d’aller moi-même jusqu’à l’habitation de l’entraîneur pour voir M. Mellish, et lui demander si décidément le Colonel dîne ici.

Elle se munit d’une ombrelle, et elle prit la direction de la loge de l’entraîneur, marchant plus vite qu’il ne convient par une brûlante journée de juillet.

— Si je puis arriver avant Hargraves, — pensa-t-elle, — je pourrai savoir pourquoi il est venu au château.