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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/196

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

Sheldon jeta la lettre de côté en jurant : il n’avait pas de temps à perdre pour de pareils radotages.

Il rompit l’enveloppe de la lettre de Nancy : c’était une honnête épître lui disant comme elle l’avait servi avec fidélité, comme elle l’avait aimé au temps passé, et lui déclarant qu’elle ne pouvait plus le servir désormais. Elle l’exhortait dans des phrases sans art et sans orthographe à songer au repentir. Il pouvait n’être pas encore trop tard, même pour un aussi grand pécheur qu’il l’avait été.

Il déchira ces deux lettres en petits morceaux et les jeta dans l’âtre.

Quant à la lettre, de Valentin, il la garda : c’était un document qui avait quelque importance légale.

Pendant un moment, il avait eu la pensée qu’il pourrait punir ces gens de leur ingérence dans ses affaires : il pouvait intenter une action en calomnie contre le docteur Jedd et le contraindre à administrer la preuve des faits allégués par lui ou à payer par des dommages-intérêts son injustifiable accusation. Il était sûr que le docteur Jedd ne pourrait rien prouver, et qu’un jury bien travaillé pourrait se montrer sévère et faire un exemple.

Mais, d’un autre côté, les présomptions tirées des circonstances étaient très-fortes contre lui, et des preuves qui eussent été insuffisantes pour établir sa culpabilité, dans un procès criminel où sa vie était en jeu, pourraient suffire pour défendre ses ennemis contre une action en calomnie, si réellement ce qui avait été fait par Valentin et le docteur Jedd pouvait constituer une imputation méchante et calomnieuse.

D’ailleurs, une action semblable n’invaliderait pas le mariage, célébré le matin, et ce seul fait entraînerait sa