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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/206

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

Sans peur comme Alcide il avait pénétré dans le royaume des ténèbres, et heureux et triomphant comme le demi-dieu, il était revenu rapportant son précieux fardeau dans ses bras vigoureux.

La lutte avait été dure, l’angoisse de l’incertitude lui avait causé une horrible torture, mais de cet effroyable combat, il était sorti meilleur et plus sage : ce qui manquait de solidité à ses principes pour compléter l’œuvre de réformation accomplie par l’amour, Valentin l’avait gagné durant la maladie de Charlotte.

La femme qui lui était promise, l’ange rédempteur dont l’affection lui avait appris à rendre grâce à Dieu, avait semblé prête à s’envoler loin de lui.

Dans les heures heureuses où il lui faisait sa cour, il se savait indigne d’elle, n’ayant d’autres droits à une si belle conquête que ceux qui résultaient d’un amour pur et sans mélange d’égoïsme.

Quand l’heure de l’épreuve vint pour lui, il se dit : Voici l’ange vengeur ! et à cette heure il lui sembla qu’il avait toujours eu le pressentiment caché du malheur auquel son avenir était condamné, même au moment où son bonheur était le plus complet. Qu’avait-il fait, pour mériter l’impunité de toutes les erreurs et de toutes les folies de sa jeunesse ?

Il regardait en arrière et se demandait s’il avait été un aussi vil pécheur qu’il était porté à le penser dans ces heures de repentir. Sa vie pouvait-elle être autre ? N’avait-il pas été lancé sur une mauvaise pente, ses premiers pas ne s’étaient-ils pas trouvés engagés dans un chemin tortueux, avant qu’il ne connût assez la vie pour savoir que dans le voyage à accomplir sur cette terre la ligne droite est celle qu’il faut suivre ?

Hélas ! la réponse faite au tribunal de la conscience