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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/299

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

côté de la route. Mais les lumières s’éteignent à onze heures habituellement, et je doute que vous trouviez quelqu’un encore debout à cette heure avancée de la soirée. »

La troisième maison de l’autre côte de la route était à un demi-mille de distance de la petite auberge.

Les lumières brillaient aux fenêtres du rez-de-chaussée, quand le vagabond eut traîné ses jambes fatiguées jusqu’à la porte de la maison.

Cette porte n’était fermée qu’au loquet et n’opposa que peu de résistance à l’intrus : il se glissa sans bruit dans une allée sablée bordée de lauriers sur lesquels se projetait la lumière des fenêtres.

Des éclats de rire et le bruit de la musique retentissaient dans l’air et l’on voyait des ombres passer derrière les rideaux des fenêtres.

Philippe s’insinua dans un coin abrité près du porche et y tomba épuisé à l’ombre des lauriers.

Il resta là assis dans une sorte de stupeur : il avait perdu quelque peu la faculté de penser, après cette longue marche ; il avait peine à se rappeler comment il était venu à l’endroit où il se trouvait et ce qu’il avait l’intention d’y faire.

« Haukehurst… murmura-t-il en lui-même, Haukehurst… l’homme qui s’est ligué contre moi avec le docteur Jedd !… J’ai juré que je lui rendrais la pareille si jamais j’en trouvais l’occasion !… Et George qui a refusé de me donner quelques shillings… mon frère unique, qui refuse de rester mon ami ! »

Haukehurst et George, l’image de ces deux hommes, flottait confusément dans son cerveau, et il avait peine à les séparer.

Parfois il lui semblait être encore assis à la porte de