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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/222

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LA FEMME DU DOCTEUR.

d’Oxford, devint ou s’imagina devenir éperdument amoureux d’elle, et, pendant le temps que dura son court accès de désespoir, les choses furent arrangées et Lansdell se réveilla fiancé.

Il était fiancé et très-amoureux de sa cousine. Les deux années qui les séparaient donnaient un avantage immense à Gwendoline sur son futur : elle essayait mille coquetteries féminines sur cet enfant naïf et généreux ; elle était fière de sa puissance sur lui, et l’aimait à sa manière, qui n’avait rien de bien démonstratif. Elle n’était en aucune façon une femme à regarder le monde comme vide sans amour. Son père lui avait dit l’état de fortune de Roland, et il avait ajouté que leurs dots réunies constitueraient un fort beau revenu. Une seule chose la fâchait : c’était qu’après tout ce pauvre Roland ne fût rien dans le monde ; un gentilhomme campagnard qui s’enorgueillissait de la longueur de son arbre généalogique et de la noblesse de sa race sans titres, mais dont le nom paraissait très-insignifiant lorsqu’on le voyait à la queue d’une liste de ducs et de marquis dans les colonnes du Morning Post.

Mais, enfin, il pouvait se distinguer au Parlement. C’était quelque chose, et Gwendoline mit en œuvre toute son influence pour pousser le jeune homme dans cette carrière. Elle activa de son souffle brûlant les flammes vacillantes de son ambition endormie. Cette jeune fille, avec sa hautaine beauté saxonne, ses yeux bleus froids, ses cheveux d’un blond pâle, était aussi ardente et aussi énergique que Jeanne d’Arc ou Élisabeth d’Angleterre. C’était une créature ambitieuse et fière : elle voulait épouser un des potentats humains et le gouverner à sa guise, et elle