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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/29

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LA FEMME DU DOCTEUR

— Les courses sont plus inintelligibles pour moi que le Grec, Master Sleaford, — dit-il.

Le mot « Master » échauffa la bile du gamin.

— Votre ami ne me semble pas avoir beaucoup d’expérience, — dit-il à Sigismund. — Je pense que nous pourrons lui enseigner pas mal de choses avant qu’il ne reparte pour le Midland, hein, Samuel ?

Horace avait découvert le fatal prénom de Samuel sur la couverture d’un vieux livre d’heures appartenant à Smith, et il le tenait en réserve, comme une sorte de trait empoisonné, toujours prêt à le lancer à son ennemi.

— Nous lui apprendrons un peu ce que c’est que la vie, n’est-ce pas, Samuel ? — répéta-t-il. — Ah ! ah ! ah !

Mais sa gaieté fut soudainement interrompue. Une porte du vestibule sombre s’ouvrit tout à coup, et un visage de femme, d’aspect anguleux et acariâtre, se montra par l’ouverture, et une voix perçante s’écria :

— Ne t’ai-je pas dit que j’avais encore besoin de deux sous de lait, mauvais drôle ? Tu es bien comme les autres, va ! Il faut que je me rende esclave sans qu’aucun de vous daigne lever seulement le doigt pour m’aider !

Le jeune Horace disparut là-dessus tout en grognant, et Sigismund ouvrit une porte conduisant au parloir.

Cette pièce était vaste, mais pauvrement meublée et très malpropre. On y voyait les traces laissées par cinq ou six locataires successifs, et on devinait que les habitants actuels se faisaient une loi de ne jamais rien ranger. Une boîte à ouvrage était sur la table et