Aller au contenu

Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/174

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
170
LA FEMME DU DOCTEUR.

nelles, il ne voyait rien qui pût justifier le point de vue hypocondriaque sur les choses de ce monde professé par la plupart de ses confrères cléricaux. Il trouvait dans ces récits sacrés une histoire qui commençait comme une idylle ; il trouvait de gais passages d’une existence dans laquelle il y avait des fêtes nuptiales et d’agréables réunions, des solennités nationales et de tranquilles promenades dominicales par les sentiers serpentant à travers les champs couverts de moissons ; il y trouvait l’amitié purement terrestre, qui n’était pas regardée comme un péché auprès des droits du ciel, et l’amour paternel poussé à l’extrême qu’on ne réprouvait pas comme une idolâtrie coupable de la créature, mais qui étaient sanctifiés à jamais par deux miracles distincts, témoignages éternels d’un amour assez divin pour être tout-puissant, assez tendrement humain pour changer les lois les plus sévères de l’univers en pitié pour la faiblesse et la misère humaines.

Pawlkatt fut appelé auprès de son rival le lendemain matin de très-bonne heure. George était déjà incapable de se soigner, car son état avait empiré pendant la nuit, et force lui était de se soumettre à tout ce qu’on voudrait exiger de lui. Il était très-malade. Isabel resta dans la chambre discrètement éclairée, lisant parfois, à la faible lumière qui filtrait à travers les rideaux ; ou simplement occupée à ses pensées, à de pénibles et douloureuses pensées. Gilbert ne dormit pas de toute la journée, se tournant et se retournant sur son lit et poussant de temps en temps des soupirs à demi étouffés qui déchiraient le cœur de sa femme. Elle était très-inconséquente ; elle avait été très-coupable ; mais il y avait une source profonde de ten-