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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/176

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LA FEMME DU DOCTEUR.

saient terriblement longues : non parce qu’Isabel ressentait une lassitude égoïste à l’accomplissement de sa tâche ; elle désirait extrêmement, au contraire, être utile à l’homme qu’elle avait si cruellement offensé ; elle ne désirait que trop ardemment faire quelque chose, une action digne de l’approbation de M. Colborne lui-même, et qui pût atténuer son péché. Mais elle n’était pas familiarisée avec la maladie, et, étant douée d’une nature hypersensitive, elle souffrait cruellement au spectacle des souffrances d’autrui. Si le malade ne dormait pas, elle imaginait aussitôt qu’il allait plus mal, beaucoup plus mal, qu’il était en danger de mort, peut-être ; s’il délirait un peu dans l’intervalle de ses courts sommeils, elle prenait ses mains brûlantes dans les siennes, tremblant de la tête aux pieds ; s’il tombait dans un profond sommeil, elle était prise d’une terreur soudaine, s’imaginant que son calme n’était pas naturel, et se demandant si elle ne ferait pas bien de l’éveiller, dans la crainte qu’il ne tombât dans une dangereuse léthargie.

La femme du médecin n’était pas une de ces excellentes gardes-malades qui savent s’établir avec un joyeux entrain dans une chambre de malade, et profiter de l’occasion pour repriser un plein panier de bas délabrés, réservés pour une occasion analogue. Elle n’était pas une garde-malade qui savait accepter les devoirs de sa position d’une façon délibérée, et accomplir chaque tâche séparée avec le sang-froid qu’un commis de banque apporte à l’exécution des travaux qui lui sont confiés. Cependant elle était fort calme, marchant doucement, la main légère, pleine de tendresse, et George était heureux de la voir assise dans la chambre obscure, lorsqu’il entr’ouvrait de