Aller au contenu

Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/177

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
173
LA FEMME DU DOCTEUR

temps en temps ses paupières alourdies ; il était heureux, en quelque sorte, de prendre ses médicaments de sa main, — de cette main fluette et blanche aux doigts en fuseau, — cette main qu’il avait admirée lorsqu’elle était légèrement posée sur le parapet moussu du pont situé dans le cimetière d’Hurstonleigh, le jour où il lui avait demandé si elle voulait être sa femme.

Mme Gilbert resta toute la journée dans la chambre de son mari ; mais vers cinq heures, George tomba dans un profond sommeil, au milieu duquel Pawlkatt le trouva quelques minutes après six heures. Rien ne pouvait être meilleur que ce tranquille sommeil, dit le médecin ; et lorsqu’il fut parti, Mathilda, qui était depuis quelque temps dans la chambre du malade, afin de rendre, s’il se pouvait, un service quelconque à son maître, suggéra à Isabel de descendre, et de faire un tour au jardin pour prendre l’air.

— Vous devez étouffer, je pense, de rester enfermée toute la journée dans cette chambre, — dit Tilly avec compassion.

Mme Gilbert rougit, et elle répondit d’un ton timide et hésitant :

— Oui, je descendrai volontiers si vous pensez que George dormira tranquillement encore longtemps ; car je sais que vous en aurez bien soin. J’ai besoin d’aller quelque part ; — pas très-loin ; mais il faut que je sorte ce soir.

La femme du médecin avait le dos tourné à la lumière ; Mathilda ne vit pas la brusque rougeur qui lui couvrit le visage et qui disparut pendant qu’elle disait ces mots ; mais la femme de charge fit entendre néanmoins un murmure désapprobateur.