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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/193

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LA FEMME DU DOCTEUR

dans la chambre. Un coup d’œil suffit à Lansdell pour voir qu’elle était très-émue, qu’elle souffrait cruellement de la terreur que lui inspirait sa présence ; et peut-être avant qu’elle eût parlé savait-il déjà qu’elle ne venait pas lui annoncer le moindre changement dans sa décision, ni aucune modification des sentiments qui avaient causé leur séparation au Roc de Thurston. Il n’y avait rien de désespéré dans ses manières, — rien de l’aplomb dramatique qui appartient aux grandes crises de la vie. Elle se tenait debout devant lui, pâle et irrésolue, levant vers lui des yeux suppliants et effarouchés.

Lansdell lui approcha un fauteuil, mais il fut obligé de l’engager à s’asseoir ; cependant, même après cela, elle resta assise avec cette espèce d’irrésolution timide qu’il avait si souvent remarquée chez quelque brave fermier venu pour demander des faveurs inusitées pour le renouvellement de son fermage.

— J’espère que vous n’êtes pas fâché contre moi de ce que je me présente chez vous à pareille heure, dit-elle d’une voix sourde et tremblante. Je n’ai pas pu venir plus tôt, sans cela…

— Ce ne peut être qu’avec plaisir que je vous vois, répondit gravement Roland, bien que ce plaisir soit singulièrement mêlé de peine. Vous êtes venue me trouver sans doute parce que vous êtes dans un embarras quelconque et que vous avez besoin de mes services d’une façon ou d’une autre. Je suis heureux que vous me témoigniez cette confiance ; je suis content de penser que vous faites fond sur mon amitié.

Lansdell parla ainsi parce qu’il vit que la femme du médecin était venue pour solliciter une faveur quelconque, et il voulait lui en faciliter la demande. Isabel