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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/202

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LA FEMME DU DOCTEUR.

comte arrivait par l’allée sablée, il n’y eut pas moyen d’éviter la visite du vieillard.

Roland jeta son cigare et se résigna à la perspective de discuter pendant une heure sur des choses qui ne l’intéressaient pas le moins du monde, et qui ne lui causaient aucun plaisir. Que lui importait qu’on s’attendît ou non à une dissolution prochaine du Parlement ? On s’attendait toujours à une dissolution à moins qu’il ne se produisît d’événement contraire ; mais il ne résultait absolument rien de tous ces bruits et de toutes ces clameurs. Les pauvres gens restaient toujours pauvres et murmuraient d’être affamés ; les riches étaient toujours riches et s’indignaient contre l’oppression d’un impôt exorbitant sur le revenu. Le pauvre Roland se conduisit admirablement pendant le supplice que lui infligea la visite de son oncle ; et s’il fit çà et là des réponses vagues et des questions étrangères au sujet, lord Ruysdale était trop absorbé par sa propre éloquence pour relever les peccadilles de son neveu. Roland ne se débarrassa de lui qu’en promettant d’aller dîner le soir même à Lowlands.

— S’il y a une dissolution, notre parti ne peut manquer d’avoir la prépondérance, — dit le comte avant de partir — et, dans ce cas, il faut que vous vous portiez candidat pour Wareham. Les habitants de Wareham voient en vous leur représentant légitime. J’entrevois de grandes choses, mon cher ami, si le ministère actuel se retire. J’ai mené très-gentiment mon petit budget pendant l’année qui vient de s’écouler ; je louerai une maison meublée à la ville, et je recommencerai la vie sur de nouveaux frais l’année prochaine si les choses marchent bien. J’espère vivre assez longtemps pour vous voir faire figure dans le monde, Roland.