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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/205

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LA FEMME DU DOCTEUR

j’ai appris avec peine qu’il est malade. Une mauvaise fièvre… il est très-dangereusement malade, à ce que m’a dit Saunders, l’avoué. C’est fâcheux, n’est-ce pas, Gwendoline ?

Le visage de Gwendoline s’assombrit, et elle jeta un coup d’œil sur Roland avant de parler.

— Je suis fâché d’apprendre cette nouvelle, — dit-elle. — J’en suis fâchée pour M. Gilbert pour plus d’une raison. Il est regrettable qu’il ait une aussi mauvaise femme.

Roland devint écarlate, et il se tourna vers sa cousine comme s’il allait lui parler ; mais Raymond le devança.

— Je pense que moins nous parlerons de ce sujet, mieux cela vaudra, — s’écria-t-il vivement. — C’est là un sujet, je crois, lady Gwendoline, qu’il vaudrait mieux ne pas discuter ici.

— Pourquoi ne le discuterait-on pas ? — s’écria Roland, regardant sa cousine d’un air furieux et méprisant. — Tout le monde sait que la calomnie de son sexe est un des privilèges de la femme. Pourquoi Gwendoline n’userait-elle pas d’un droit consacré ?… Le sujet est infime, sans doute, — c’est une pauvre petite nullité provinciale ; mais elle servira, faute de mieux : étalons-la donc sur la table, je vous en prie, et vous, Gwendoline, apportez vos instruments de dissection. Qu’avez-vous à dire contre Mme Gilbert ?

Il attendit, haletant et furieux, la réponse de sa cousine en la regardant d’un air de sombre défi.

— Peut-être, après tout, M. Raymond a-t-il raison, — dit tranquillement Gwendoline. Elle était fort calme, mais très-pâle, et regardait aussi fixement son cousin en face que si elle s’était battue en duel avec lui. —