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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/206

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LA FEMME DU DOCTEUR.

Le sujet est de ceux qui, ici comme ailleurs, ne valent pas la discussion ; mais puisque vous m’accusez de méchanceté féminine, je dois me défendre. Je dis que Mme Gilbert est une mauvaise épouse et une femme de mauvaise conduite. Une personne qu’on voit donner des rendez-vous secrets à un étranger, non pas une, mais plusieurs fois, avec toutes les apparences d’une action clandestine et mystérieuse, pendant que son mari est entre la vie et la mort, cette femme est assurément une des plus indignes et des plus viles créatures.

Lansdell fit entendre un rire discordant.

— Quel pays que le Midland ! — s’écria-t-il, — et quelle merveilleuse puissance d’invention reste sans culture parmi les habitants de nos petites villes ! Je retire toute insinuation impertinente sur votre talent pour la calomnie, ma chère Gwendoline, car je vois que vous êtes tout à fait novice dans cet art subtil. La moindre science rudimentaire vous apprendrait à distinguer entre les histoires bien trouvées et celles qui ne le sont pas ; il importe peu, du reste, qu’elles soient fondées ou non. Malheureusement cette calomnie de Graybridge est un canard des plus grossiers. Un correspondant de journal qui l’enverrait pour remplir un bas de colonne serait remercié pour cause d’incapacité, en récompense de sa méprise. Dites à votre femme de chambre d’être plus circonspecte à l’avenir, Gwendoline.

Gwendoline ne daigna pas discuter la vérité ou la probabilité de son histoire. Elle vit que son cousin avait les lèvres blêmes, et elle ne douta pas que son coup n’eût porté en plein. Après cela la conversation languit. Lord Ruysdale mit sur le tapis un ou deux de ses sujets favoris ; mais il comprit vaguement