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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/212

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LA FEMME DU DOCTEUR.

sabel dût voir secrètement cet homme, à moins qu’il n’y eût quelque chose de criminel dans leur réunion. Le mystère et le crime vont si souvent ensemble qu’il est presque difficile à l’esprit de les séparer.

— Mais l’a-t-on vue avec lui ? — s’écria tout à coup Roland. — Non, je ne veux pas le croire. On a rencontré une femme en compagnie d’un homme, et les vautours de Graybridge, ardents à tomber serres ouvertes sur ma pauvre colombe innocente, ont décidé que ce devait être Isabel. Non, je ne veux pas croire cette histoire.

— Soit, alors, — répondit Raymond. — En ce cas, parlons d’autre chose.

Mais on ne satisfaisait pas Roland si aisément. Le trait empoisonné avait pénétré profondément dans son âme : il fallait qu’il tournât et retournât l’arme cruelle dans la blessure.

— Pas avant que vous ne m’ayez donné le nom de la personne qui vous a renseigné, — dit-il.

— Voyons, mon cher Roland, ne vous ai-je pas dit que c’étaient les cancans de Graybridge ?

— Vous ne me ferez pas croire cela. Vous êtes la dernière personne du monde qui se laisserait influencer par une méchante calomnie de province. Vous avez de meilleures raisons pour parler comme vous l’avez fait. Quelqu’un a vu Isabel avec cet homme. Quelle est cette personne ?

— Je proteste contre cet interrogatoire. J’ai eu la faiblesse de sympathiser assez avec un attachement peu honorable, pour essayer de vous épargner une douleur. Vous ne voulez pas être ménagé : souffrez donc votre obstination. C’est moi qui ai vu Isabel Gilbert en compagnie d’un étranger, — un individu