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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/287

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LA FEMME DU DOCTEUR

Dieu le juge à propos, il dit : Que la lumière soit ! et le fou devient sage. La résurrection des morts dans Jérusalem n’était que le type des miracles qui devaient s’accomplir dans la suite. Avez-vous jamais lu les lettres de quelque malheureux condamné attendant l’heure de son exécution ? Quelle exaltation les pénètre ! L’infortuné sait à peine lire, peut-être ; mais il ne s’en complaît pas moins dans de longues rapsodies incorrectes sur le ciel et la gloire éternelle. Vous levez les épaules et vous dites : Comédie ! hypocrisie ! Et cependant, cela peut être sincère. Aucun homme ordinaire, en bonne santé, ayant foi dans l’avenir d’une longue existence, ne peut comprendre les sentiments de celui qui se trouve face à face avec la mort… la mort, qui perd la plus grande partie de ses terreurs lorsque nous commençons à sentir que tout ne finit pas avec elle. Ce n’est que lorsque nous sommes tout à côté de la porte que nous pouvons entrevoir le pays enchanté qui commence au delà. Je me rappelle que lorsque j’étais enfant, je pensais que la terre était tout unie comme une prairie, et que le voyageur trop téméraire qui se risquait jusqu’à la haie qui la bordait tombait la tête la première dans le chaos. Aujourd’hui, je souris encore en pensant à cette idée puérile ; mais il est possible que quelques-unes de mes idées depuis cette époque n’aient pas été plus raisonnables que celle-là.

Il continua à parler ainsi, tenant entre ses mains la main d’Isabel. Il paraissait très-heureux, — absolument calme. Gwendoline lui avait offert de lui faire la lecture, et le curé de la paroisse était venu le voir, cherchant à le convaincre de la nécessité de certains exercices religieux, ardent à l’exhorter et à l’éclairer ;