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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/291

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LA FEMME DU DOCTEUR

vagues murmures de la nature qui s’éveille. Il savait aussi certainement que si tout un conclave de médecins s’était prononcé sur son mal, que sa vie était finie ; et que s’il y avait quelque vitalité dans son esprit, quelque sentiment de l’avenir dans son cœur, cela tenait, si vague et si imparfait que ce fût, à un pressentiment des choses qui commencent après la mort.

— Je sais que je vais mourir, et cependant je n’ai pas la mort dans l’esprit, — pensait-il. — Y a-t-il quelque chose après cette vie… quelque chose qui commence après la dernière pulsation du cœur ? Phrénologues qui nous enseignez que les plus nobles sentiments de notre esprit ne sont qu’une petite quantité de matière grise qui périt éternellement dès que la moelle épinière est paralysée ; — physiologistes, prédicateurs de la doctrine qui faites de l’univers une échelle ascendante de progression mécanique, et de l’homme, le meilleur et le plus intelligent, rien de plus que le dernier développement du têtard et le frère utérin, un peu plus civilisé, du gorille, — je m’étonne que vous soyez convaincus d’ignorance, après tout. N’y a-t-il que les enfants qui aient le sens commun ? Ces créatures folles et ignorantes que j’ai vu marmotter de naïves prières dans les sombres cathédrales de la Belgique, sont-elles plus près de la lumière que tous ces princes de la science moderne, qui extirpent l’âme du cœur d’un homme et qui lui disent de quelle matière elle est faite ?

Toutes sortes d’idées décousues remplirent l’esprit de Landsdell pendant le temps qu’il resta couché au milieu des herbes foulées et recouvertes par les branches folles des églantiers fleuris. Il savait que sa vie était finie ; il savait que pour lui tout intérêt pour la