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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/46

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LA FEMME DU DOCTEUR.

doir, demi-salon, à l’extrémité d’une enfilade d’appartements magnifiques. Elle ôta son chapeau et son châle et lissa ses bandeaux devant la glace. Elle était un peu changée depuis l’automne précédent, et le visage qu’elle voyait ce jour-là était plus allongé et plus fait que cette figure bouleversée et inondée de larmes qu’elle avait vue dans son miroir le soir du départ de Roland. Son chagrin n’en avait pas été moins réel, parce qu’il était fou et puéril, et il avait laissé ses traces sur son apparence extérieure. Mais elle commençait à s’en guérir. Elle était presque fâchée qu’il en fût ainsi. Elle était presque peinée de reconnaître que son chagrin était moins cuisant que six mois auparavant, et que l’éclat de l’image de Roland était peut-être un peu terni.

Mais ce jour-là Mme Warman était destinée à détruire le bon effet si récemment produit par de bonnes lectures et à réveiller tous les regrets d’Isabel pour le châtelain errant de Mordred. La digne femme de charge avait reçu de son maître une lettre qu’elle apporta triomphalement à Mme Gilbert. C’était une lettre fort courte, renfermant des chèques destinés à différents payements et donnant quelques ordres relatifs aux jardins et aux écuries.

« Veillez à ce qu’on envoie des ananas et des raisins à Lord Ruysdale, dès qu’il en désirera. — Je serai charmé d’apprendre que vous avez envoyé de temps en temps des fleurs et des fruits de serre à M. Gilbert, le médecin de Graybridge ; il s’est montré plein de bonté pour quelques-uns de mes gens. — Prenez soin qu’on ait tous les égards possibles pour Mme Gilbert toutes les fois qu’elle viendra à Mordred. »