Aller au contenu

Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/75

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
71
LA FEMME DU DOCTEUR

culte. Rien ne pouvait ajouter à cette perfection ; la coupe était pleine jusqu’au bord d’une source intarissable de joie et de délices.

Lansdell s’arrêta pour donner une poignée de main à Isabel lorsqu’ils atteignirent la porte conduisant sur la route de Graybridge.

— Adieu, — dit-il doucement, — adieu, jusqu’à mercredi, Isabel. Isabel… quel joli nom ! N’avez-vous pas d’autre nom de baptême ?

— Non.

— Rien qu’Isabel… Isabel Gilbert. Adieu.

Il ouvrit la porte et suivit du regard la femme du médecin pendant qu’elle traversait la prairie et se dirigeait rapidement vers la ville. Un homme passa sur la route comme Lansdell y était encore et le regarda tandis qu’il s’éloignait, puis il se retourna pour regarder Isabel.

— Raymond a raison, — pensa Roland, on a déjà commencé à nous remarquer et à causer. Pauvre chérie ! c’est dorénavant mon devoir de te protéger contre de pareilles choses. Graybridge !… Graybridge !… on dirait d’une prison. Combien j’aspire à l’air libre de la Suisse ; le ciel bleu, les eaux d’azur, les nuages aux teintes prismatiques, les sommets nuageux ! Cela fait l’effet de monter à moitié chemin du ciel que de vivre là. Et je m’arrêterais dans ce petit coin de paysage anglais, et je m’y enchaînerais pour suivre la loi de Graybridge ! Je serais prisonnier pour la vie, ayant Graybridge pour geôlier ; je verrais le visage enchanteur de ma bien-aimée me regarder à travers les barreaux de son cachot, devenir de jour en jour plus pâle, jusqu’à ce qu’il s’efface pour toujours, plutôt que de scandaliser les sentiments de Graybridge ? Qu’ils me