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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/210

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LES OISEAUX DE PROIE

— Parbleu ! répondit Sheldon avec un air de réserve. Autrement, comment pourrais-je vous allouer trois mille livres sur la part que j’espère en obtenir.

— Assurément. Je pense que je m’en tirerai assez bien, lorsque j’y aurai mis la main ; mais je serais bien aise d’avoir vos instructions pour commencer.

— Eh bien ! mon avis est celui-ci. Il faut que vous commenciez par le commencement ; que vous alliez d’abord à Ullerton voir mon vieil habitant. J’en ai tiré tout ce que j’ai pu en tirer ; mais je n’ai pas eu assez de temps pour épuiser cette source. Il faut avoir une éternité à y consacrer avant de pouvoir faire jaillir quelque chose de cette vieille cervelle fêlée. Poursuivez ce Matthieu depuis sa naissance, visitez le lieu où il est né, fouillez tous les détails de sa vie, suivez-le pas à pas jusqu’à son départ pour Londres, et, quand vous l’aurez rejoint là, attachez-vous à lui comme une sangsue, ne le laissez pas échapper de vos doigts un seul jour, traînez-le de logement en logement, de taverne en taverne, à son entrée en prison et à sa sortie…, au galop, sans souffler, bravement. Je sais bien que c’est un métier de chien, mais il faut rudement travailler par le temps qui court pour gagner trois mille livres. En deux mots, le gibier est là devant vous, fondez sur lui, pressez-le, » dit Sheldon en manière de conclusion, en se faisant un dernier grog, qu’il avala d’un trait.