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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/266

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LES OISEAUX DE PROIE

« Avant de partir pour Spotswold, il était nécessaire que je revisse Goodge. Je trouvai ce gentleman dans les dispositions les plus pieuses et en même temps très-affairé. Il s’était adressé aux Écritures, comme le fondateur de sa secte, mais, je le crois, avec des aspirations moins idéales. Il s’était arrêté au 12e verset du 9e chapitre du Livre des Proverbes.

« — Si tu es sage, tu emploieras ta sagesse pour toi-même, dit-il solennellement. D’où je conclus que je serais impardonnable si je vous livrais ce que vous cherchez, sans aucune rémunération convenable. Je vous demande, en conséquence, jeune homme, ce que vous êtes disposé à faire ?

« Le ton avec lequel le révérend Jonas prononça ces paroles n’aurait pas été plus majestueux ni plus protecteur s’il eût été Saül et moi l’humble David ; mais un homme qui cherche à gagner trois mille livres doit savoir passer par-dessus beaucoup de choses. Voyant que le ministre était disposé à se faire brocanteur, je ne crus pas devoir user de plus de cérémonie.

« — Le prix dépendra de l’article que vous avez à vendre, dis-je, il faut que je le connaisse pour pouvoir l’apprécier.

« — Supposez que mes renseignements aient la forme de lettres.

« — Lettres de qui… à qui ?…

« — De Mme Rebecca Haygarth à mon grand-oncle Samson Goodge.

« — Et combien de lettres de ce genre avez-vous à vendre ?

« Je dis cela très-crûment, mais les susceptibilités du révérend Jonas n’étaient pas des plus vives, et il ne sourcilla pas.