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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/136

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LA VIE DE FAMILLE

pendant entendu raconter — et ceci me semble vraisemblable — que cette fête date du commencement de la colonie, lorsque, après une longue pénurie et à l’approche d’une famine, cinq navires chargés de blé arrivèrent enfin de l’Angleterre ; c’est pourquoi pendant longtemps il a été d’usage dans le Massachusett de mettre, à l’occasion de cette fête, cinq grains de blé sur chaque assiette de convive au dîner, usage qui paraît avoir été conservé dans certaines parties de cet État. Le temps était beau mais froid quand, après le service divin, nous nous promenâmes dans cette ville rustique, aux petites maisons, aux petits jardins, et vîmes ses habitants bien vêtus, sortant de l’église, rentrer chez eux. Tout et tous rendaient témoignage de l’ordre, de l’aisance sans vanité et sans luxe qui règnent dans leurs demeures.

Nous dînâmes en grande compagnie à une table servie avec abondance et simplicité en même temps, chez l’un des parents de Marcus. Le soir, nous fûmes chez sa sœur et son beau-frère, qui possède et exploite une grande ferme près d’Oxbridge ; — ce sont le père et la mère de la femme du docteur ; — toute la famille y était réunie. La mère de famille, femme posée, agréable et maternelle, « comme il faut » dans ses manières, me plut infiniment par la noblesse et la délicatesse de son âme ; il en est de même pour les gens, en général, simples et affectueux de cette contrée. Ils sont beaucoup plus intimes et moins questionneurs que bon nombre de personnes que j’ai rencontrées dans de grandes sociétés. Nous eûmes un magnifique souper avec les deux plats obligés de la fête des Actions de grâces, le dindon et le plumpudding. On prétend dans les États de la Nouvelle-Angleterre que les dindons prennent un air mélancolique à l’approche de cette fête, car on en