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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

les classes, et sont bordés de jolies maisons faites ou en construction, de jolis magasins et d’une foule de laides friperies. — Il y a un peu de confusion dans Broadway, ce qui ne laisse pas de me troubler, et je ne songe, quand il faut traverser la rue, qu’à m’en tirer la vie sauve. Le joli petit parc qu’on trouve avec sa belle fontaine près du mugissant Broadway est une oasis au milieu des sables soulevés. Je vais maintenant te dire un mot sur mon arrivée ici.

Ma précédente lettre s’est arrêtée la veille du jour où nous devions toucher à Halifax. La nuit suivante a été la seule un peu dangereuse de toute la traversée ; car nous approchions avec un vent très-fort des redoutables brisants de la côte, ce qui nous obligeait parfois de nous arrêter. Mais le matin nous trouva ancrés devant Halifax, et je vis les brisants se dresser à distance, avec fracas, et tels que de gigantesques animaux marins, autour de nous. Étant descendue à terre, j’ai retrouvé à Halifax ce que l’ancien monde a de plus mauvais, des brouillards, des haillons, des mendiants, des enfants sales qui criaient, des chevaux maigres, etc., etc., et j’ai été fort contente de ne passer ici qu’une couple d’heures.

Le lendemain, nous nous dirigeâmes au sud, vers New-York : c’était une véritable fête, température chaude, mer calme, bon vent ; le soir, mer phosphorescente, ciel resplendissant d’étoiles qui perçaient de poétiques nuages. Quelle magnifique soirée ! Je suis restée sur le pont fort tard, contemplant les explosions de lumières que notre course appelait de l’abîme le long de notre quille. Nous voguions pour ainsi dire sur une mer d’argent luisant, où apparaissaient sans cesse de charmantes constellations d’étoiles d’or.