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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/291

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

stante. Il n’en fut rien. Le lendemain matin, le temps était redevenu gris, froid, et n’avait aucune ressemblance avec l’été.

Une partie des passagers souffrant du mal de mer se tenait dans les cabines : d’autres prirent place sur le tillac pour jouer joyeusement aux cartes. J’étais assise à l’écart avec les « amis, » qui se taisaient et finirent par s’endormir de nouveau. Quant à moi, j’étais très-vivace, je me portais parfaitement et je passai une charmante matinée en compagnie avec la mer et l’Histoire des États-Unis, par Bancroft. Elle m’intéresse infiniment ; le coup d’œil véritablement philosophique que l’auteur jette sur le développement historique et la perfection de son style narratif rendent cette histoire fort remarquable. Sous le premier rapport, Bancroft ressemble à notre Geijer, et sous le second au Suisse d’Aubigné. J’ai lu aussi durant le voyage un petit écrit sur « l’admirable Providence, » par un célèbre clairvoyant de New-York, nommé Davis ; mais je ne connais pas de production plus pauvre et rendant mieux témoignage de l’aveuglement de l’esprit.

Nous sommes arrivés à Charleston dans la matinée du quatrième jour par un temps froid et nullement agréable ; mais les rives du port, couvertes de sombres forêts de cèdres et d’arbres à feuilles vert clair, présentaient un aspect attrayant et non pas ordinaire. Tout était nouveau pour moi, même l’apparence de la ville qui ressemblait, du moins par la construction des maisons, davantage à celles de l’Europe, que les maisons de New-York et de Boston. Un jeune homme avec lequel j’avais causé agréablement à bord, qui me plaisait assez, excepté qu’il tirait vanité de son habileté en fait de langue française, habileté peu justifiée, se tint à côté de moi sur le pont pour contempler