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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/336

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LA VIE DE FAMILLE

blancs. Autour de l’estrade où se trouve la chaire est une table-autel formant un grand carré. En dedans de cette table et du côté des blancs, sont assis sur des bancs et au pied de la tribune les prêtres méthodistes, de belles et hautes figures pour la plupart, avec fronts larges et sérieux, et du côté des noirs leurs guides et solliciteurs spirituels ; plusieurs de ceux-ci sont mulâtres ; leur physionomie est remarquable, énergique. À mesure que la nuit avance, la disposition des esprits s’échauffe. Les hymnes courtes, mais brûlantes, s’élancent ; on dirait des soupirs mélodieux et ardents ; elles sont chantées de temps à autre par des milliers de voix harmonieuses. Le zèle des prédicateurs augmente ; deux sont tournés du côté des blancs, deux du côté des noirs ; ils étendent les mains, invitant les pécheurs à venir : « Arrivez tous à cette heure, qui est peut-être la dernière, la seule qui vous reste pour vous approcher du Sauveur, et — éviter la damnation éternelle. » Minuit approche, les feux ont moins d’éclat, mais l’exaltation grandit et devient générale. Les hymnes de la résurrection se mêlent aux appels des prêtres, aux exhortations des solliciteurs, aux soupirs et aux cris de l’auditoire. Des jeunes filles, des jeunes hommes se lèvent, sortent des rangs des blancs, et se posent comme s’ils étaient brisés devant la table-autel. Ils y sont reçus par des prêtres qui se baissent vers eux, reçoivent leur confession, les exhortent et les consolent. Dans les rangs des noirs, il y a grand tumulte et de grands cris. Les hommes rugissent, les femmes crient comme les porcs quand on va les tuer. Plusieurs ont des convulsions, sautent, frappent autour d’elles, on est obligé de les contenir, cela ne ressemble pas mal à une mêlée ; les spectateurs plus calmes rient. On entend une foule de cris d’angoisse, mais seule-