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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/390

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LA VIE DE FAMILLE

trées sablonneuses des États du Sud. Ces derniers sont d’ordinaire aussi relâchés dans leurs mœurs qu’ignorants. Les lois des États défendant d’apprendre à lire et à écrire aux nègres, les écoles ne peuvent subsister dans des contrées dont la moitié de la population se compose d’esclaves ; les pauvres blancs de la campagne ne reçoivent donc, pour ainsi dire, aucune instruction. Ils manquent, en outre, du sentiment de l’honneur, de l’émulation, du travail. Ici, lorsqu’un blanc a gagné un peu d’argent, la première chose qu’il fait, c’est d’acheter un ou une esclave. Ce dernier est obligé de travailler pour toute la maison. Les maîtres pauvres se font un honneur de ne rien faire, de charger l’esclave de tout le travail, et il le fait généralement assez mal, surtout s’il a un maître paresseux. La maison ne prospère pas, et si le maître souffre de la faim, il en est de même pour l’esclave ; il en résulte une misère excessive. Mais revenons aux mangeurs de terre glaise.

Groen et sa famille sont de bons exemplaires de cette espèce de gens. Ils habitent bien avant dans la forêt où il n’y a ni chemins ni sentiers. La journée était chaude, étouffante, même dans la forêt. Des chênes-poison, (sorte d’arbre nain que l’on dit très-vénéneux) croissaient partout dans le sable. Une maison en bois nouvellement construite, assez avant dans la forêt, par des personnes charitables qui étaient venues en aide à la famille qui l’habitait, contenait le mari, la femme, cinq on six enfants. Ils avaient un abri, mais c’était tout ; je n’y ai vu aucun ustensile de ménage, ni âtre ni porte. Groen, petit homme de cinquante ans et jovial, était content de son univers, de lui-même, de ses enfants et surtout de sa femme qu’il nous représenta comme étant la meilleure du monde, il en paraissait enchanté. Celle-ci, quoique grise de teint et de