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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/415

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

avec eux. Cocher et chevaux sont de vieux serviteurs de confiance ; nous sommes obligées d’aller comme ils l’entendent, c’est-à-dire lentement. L’un de ces matins, la conversation suivante a eu lieu entre l’esclave et sa maîtresse. Elle. « Mon cher Richard, ne nous conduis pas par telle rue, elle est longue et poudreuse, nous n’arriverons pas. Entends-tu, Richard ? — Lui. Je veux prendre ce chemin, mame. — Elle. Ah ! mon cher Richard, ne peux-tu pas en prendre un autre ? par exemple la rue de… — Lui. Non, mame, j’ai quelque chose à faire dans la rue de… — Elle. Hélas ! ne pouvons-nous pas éviter de passer par là ? — Lui. Non, mame, j’ai besoin par là. » Et malgré des prières renouvelées un peu après, nous fûmes obligées de suivre la route que l’entêté Richard avait décidé. Ces vieux serviteurs de confiance sont plus têtus que les nôtres ; mais il y a quelque chose de si bon, de si chaudement cordial dans leurs yeux : ils veulent le bien de la famille.

M. William Howland est de retour ; ses manières sont parfaites. C’est évidemment un père de famille bon, aimé, et qui paraît jouir du bonheur de passer quelque temps en paix au milieu des siens. Les enfants dansent le soir avec encore plus d’entrain qu’auparavant, depuis que Justine est à la maison et danse avec eux.

J’ai assisté chez M. Gilman à un service du soir pour les nègres, dans une salle que le digne prêtre leur avait ouverte. Le premier prédicateur, qui était un vieux nègre, fut obligé de céder la place à un autre, tellement animé, disait-il, par la puissance de la parole, qu’il lui était impossible de se taire. Il donna carrière à son éloquence pendant un bon moment, mais en répétant toujours la même chose. Ces prédicateurs nègres étaient bien inférieurs à ceux que j’avais entendus à Savannah. Celui-ci finit par in-