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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/53

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

limpide sortant de la sombre forêt terrestre. Elle me réjouit pour ainsi dire intérieurement.

Je me suis séparée de mademoiselle Sedgewick avec beaucoup de regret. Sa nièce Suzanne est une jeune personne agréable, instruite. Un jeune homme, qu’on dit fort épris d’elle, est accouru ici sur ses traces.

Quelques jours après notre course à la montagne, nous en avons fait une autre sur l’Hudson ; nous allions chez la famille Donaldson, qui fait partie de l’aristocratie des bords de cette rivière. Nous partîmes de bonne heure le matin. L’air était délicieux, tranquille ; les rives de l’Hudson puisaient leur magnificence d’automne dans un soleil un peu couvert. À peine si la voile bougeait, et sur les hauteurs s’étendait une sorte de fumée solaire, un brouillard transparent, qui, à cette période de l’année, tient à l’état de l’atmosphère, appelé ici « l’été indien. » Il arrive, dit-on, à la fin d’octobre, dure souvent pendant tout le mois de novembre, une partie de décembre, et compte parmi les plus beaux moments de l’année. Si j’en juge par ces jours-ci, il est presque impossible de se figurer un temps plus parfait, chaleur, calme, l’air le plus pur, le plus transparent, toujours du soleil, mitigé par la légère fumée de terre, qui jette un voile mystique et romantique sur un paysage que sa parure d’automne rend resplendissant. D’où provient ce poétique voile de vapeur ? « Des Indiens qui fument maintenant leurs pipes dans leurs grands pahaws (assemblées de conseil), répondit gaiement madame Downing ; je désire que vous ayez des notions exactes sur ce pays. » La vérité exacte, c’est que personne ne peut dire d’où proviennent cette fumée et cet été en automne. Mais revenons à notre course, elle était ravissante. Nous sortîmes de la contrée haute des bords de l’Hudson, ses rives s’aplatirent, la