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Page:Broglie - La morale évolutioniste.djvu/71

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désordre a passé dans les mœurs. La famille primitive, la famille monogame et indissoluble a subi dans les coutumes de graves et fâcheuses modifications. La polygamie, les mœurs libres, les désordres contre nature ont pu passer à l’état de coutume, quelquefois même a l’état de lois. La conscience a pu s’obscurcir de beaucoup de ses prescriptions. Ici nous pouvons quitter le terrain de l’hypothèse et mettre le pied sur le sol fixe de l’histoire. Ce double mouvement, l’un de progrès et de développement organique d’une société primitive où régnaient une morale et une religion pure, l’autre de corruption de la religion, de la morale et des institutions sociales nous amène à l’état de l’humanité, telle que nous la trouvons à l’aurore des temps historiques.

Dans cet état si confus et si désordonné, au milieu de cette variété de mœurs et d’usages, nous voyons, à côté les uns des autres, les résultats les plus abjects de la dégradation de l’homme primitif, et les restes glorieux de la sagesse qu’il a reçue de Dieu à l’origine. Les admirables hymnes des Védas, la morale pure et religieuse des vieux livres de la Chine, la théologie et la morale de l’Égypte, l’idée du jugement et de la vie future que les anciens livres de ces peuples contiennent, l’ancienne constitution patriarcale de la famille, qu’est-ce ? sinon le développement de l’idée de Dieu et de sa justice communiquée aux premiers hommes et transmise à ses descendants. Jamais la philosophie postérieure n’a atteint la hauteur et la sublimité des vieux hymnes des Védas, la simplicité avec laquelle ces vieux chantres de l’Inde invoquent la bonté paternelle et reconnaissent la justice du Dieu suprême.

Nulle part, mieux que dans la Chine antique, les devoirs des enfants envers leurs parents ne sont exposés. D’autre part, toutes les absurdités de l’idolâtrie, toutes les cruautés de la magie et des religions sanguinaires, tous les usages moraux révoltants des différentes nations, nous montrent comment de ce point de départ simple, mais pur et élevé, l’homme a pu descendre aux plus complètes dégradations de l’esprit et du cœur.

Mais l’humanité n’est pas restée au fond de cet abime. Elle a essayé d’abord par elle-même d’en sortir. Puis son Créateur lui est venu en aide. Ici nous entrons tout à fait dans l’histoire. C’est un très intéressant spectacle que celui que nous présentent dans l’antiquité les tentatives nombreuses de réformes morales, religieuses et sociales. Il semble que, réveillée de son engourdissement, l’humanité ait cherché à retrouver ces vérités qu’elle avait perdues, mais qui brillaient encore à son horizon. Les réformes ont lieu dans les différectes branches de l’organisation de la société. Tantôt ce sont des réformes religieuses. C’est Zoroastre, qui donne aux Iraniens