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Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/130

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d’habits brodés, vint droit à moi, et me demanda mon nom ; je le lui dis ; il m’adressa alors quelques mots avec un sourire bienveillant sur mon séjour dans les provinces illyriennes, et s’éloigna, content je le suppose, d’avoir fait, in anima vili, preuve d’omniscience et d’ubiquité. Cela fut fort admiré.

J’assistai, comme tant d’autres, au bal de sinistre augure que le prince Schwartzenberg donna à l’empereur fraîchement divorcé et à la nouvelle impératrice. Je les vois encore assis, côte à côte, sur deux petits trônes contigus, au fond d’une salle en bois, construite à la hâte, mais splendidement décorée, et adossée, tant bien que mal, au salon du pavillon Montesson faisant le coin des rues du Mont-Blanc et de Provence. L’empereur était radieux ; encore plus l’impératrice, princesse un peu épaisse, de bonne mine, haute en couleur, et, selon toute apparence, bien constituée : c’est du moins l’éloge que lui donne, à plusieurs reprises, l’illustre et national historien de cette époque encore illustre, mais déjà fort peu nationale, si le bonheur de notre pays et son avenir sont comptés pour quelque chose.

On sait quelle part avait eu l’orgueil dans le choix impérial ; la fille des Césars était de meilleure