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Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/236

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sous forme de curiosité insolente, ou de menace à chaque relai, dans chaque auberge. C’est ce flux et reflux d’agitations, de nouvelles, d’appréhensions, de conjectures, qui peut-être ne ressort pas assez en saillie dans le récit grave et régulier de M. Thiers ; mais peut-être aussi qu’en s’y engageant il se serait perdu dans les particularités et les minuties.

Le premier défilé à passer, c’était la rencontre inévitable et prochaine entre l’empereur et les alliés. Cette rencontre pouvait tout emporter. Si l’empereur remportait une victoire décisive, une victoire pareille à celle d’Austerlitz ou d’Iéna, il était de nouveau le maître du monde ; il ne restait plus au gouvernement autrichien qu’à courber la tête et demander pardon. S’il était vaincu, en revanche, et repoussé l’épée dans les reins jusqu’à la frontière de France, c’était l’empereur Alexandre qui devenait le roi des rois, l’Agamemnon de l’Europe, le libérateur du continent, et le mouvement populaire en Autriche entraînait son gouvernement à la queue des alliés ; il n’y figurait qu’au dernier rang et sur l’arrière-plan, décrié, vilipendé, déclaré traître à la patrie allemande.

Pour que M. de Metternich conservât la haute