Aller au contenu

Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/28

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ce mandat étaient bien vêtus et se comportèrent en hommes bien élevés, chose déjà rare à cette époque.

Bientôt après, nous partîmes pour Saint-Remy.

Mon arrière-grand’mère était morte ; Saint-Remy appartenait à ma mère ; c’est là que nous avons passé, mes sœurs et moi, toute l’année 1793, et la première moitié de 1794. C’est là que mon père a été arrêté, conduit dans la prison de Gray, puis enfin traîné à Paris, et livré au tribunal révolutionnaire. C’est là que ma mère a été arrêtée, conduite à la prison de Vesoul, d’où elle s’est heureusement échappée.

Je me souviens très distinctement des premiers temps passés à Saint-Remy par mes parents. Je me souviens de l’arrivée des ordres d’arrestation. Ces ordres ne furent point exécutés de vive force. Mon père et ma mère délibérèrent, en ma présence, dans un cabinet que je vois d’ici et qui leur servait de salle à manger, sur la question de savoir s’ils obéiraient, et prirent librement ce dernier parti.

Comment cela fut-il possible à pareille époque ? Je l’ignore. Mais, sur le fait lui-même, je n’ai aucun doute.

Mon père s’étant constitué prisonnier à Gray, et