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Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/76

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Baylen. Un an après, toute la grande armée passait devant nous, en charrette de poste, en grande hâte et grand fracas, étincelante d’or et d’acier, pleine de joie et d’espérance. Je vois encore entrer, le matin, dans ma chambre, le brillant Auguste de Colbert, et son état-major, me tirant par les pieds, et se moquant de ma paresse. Quel élan, quel entrain, quelle confiance dans le succès, quel mépris pour l’ennemi ! Hélas ! de cet essaim gai, animé, tapageur, un seul, si je ne me trompe, un seul, Adrien d’Astorg, a repassé les Pyrénées ; la grande armée presque tout entière y a laissé ses os !

Le général Auguste de Colbert a été tué en Galice. Il était l’aîné de quatre frères qui se sont élevés, par leur épée, aux premiers rangs de l’armée, et dont la détresse avait été telle, au début de leur carrière, qu’entre eux quatre, ils n’avaient qu’un seul habit de ville qu’ils se prêtaient tour à tour. Jamais nom plus glorieux n’a été plus glorieusement porté.