Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/89

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vaincus ; les uns comme les autres parlaient de leurs misères, de leurs souffrances, avec amertume, et, s’il faut en croire ceux qui approchaient le maître, lui-même n’était ni plus satisfait ni plus confiant.

Je commençais à trouver le séjour de Vienne assez insipide, lorsqu’enfin je reçus une destination. Ce fut à peu près au moment où mon collègue, M. de Tournon, fut envoyé à Rome comme préfet ; et je dois dire, en passant, que cette mission ne parut extraordinaire ni à lui ni à personne. La réunion de Rome à l’empire français, l’emprisonnement du pape, avaient paru chose simple et sans conséquence à tous les serviteurs de l’Empire. Il leur paraissait également simple et sans conséquence d’être excommuniés, et de prendre en main l’administration du patrimoine de saint Pierre. Camille de Tournon, que nous appelions en plaisantant Furius Camillus Capitolinus, partageait cette indifférence qui nous était commune. Il est douteux qu’aujourd’hui on trouvât facilement, parmi les hommes honnêtes et sensés, une humeur aussi complaisante.

On m’envoya en Hongrie, comme intendant du comitat de Raab-Eisenbourg. Jusqu’alors, toute la partie de la Hongrie qu’occupait l’armée française,