Aller au contenu

Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/208

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
186
LE CORRECTEUR TYPOGRAPHE

un jouet irresponsable entre les mains des meneurs. Chez ce gradé intermédiaire dont la situation sociale est mal définie dans trop d’ateliers, la notion d’autorité et de respect ne doit subir aucune atteinte. Le correcteur dont l’éducation est supérieure à celle de tous ceux qui l’entourent doit savoir que, même dans les questions étrangères au travail, son avis est apprécié ; ceux qui le jalousent sont en maintes circonstances les plus ardents à accepter et à régler leur conduite sur la sienne.

Le bureau, l’atelier appartiennent au patron ; ils sont sous l’autorité du directeur ou du prote, sous la surveillance des chefs d’atelier : employé ou ouvrier, le correcteur ne doit pas l’oublier ; envers son hôte, envers le chef de la famille ouvrière, envers ses représentants, il est tenu au moins d’observer les devoirs de l’hospitalité : le contrat de travail lui en fait une obligation stricte.

Mais, si le correcteur doit respecter ses supérieurs, il importe certes autant que lui-même soit respecté. Nous ne craignons pas de le répéter, le patron, le prote ne peuvent donner aux ouvriers cet exemple déplorable du dédain, du mépris ou plus simplement de l’indifférence hautaine que trop souvent ils éprouvent pour ce collaborateur. Agir de la sorte serait priver brutalement le correcteur de l’autorité morale qui lui est indispensable pour l’exercice de ses fonctions. Dans la vie de l’atelier trop de faits viennent déjà battre en brèche cette autorité, pour que le patron et le prote ne prennent souci d’y remédier, loin de contribuer eux-mêmes à rendre illusoire une influence indispensable.

Un patron évite avec soin de faire publiquement à son subordonné une réflexion désagréable. Outre que recevoir une observation est toujours pénible, il est de ces piqûres d’amour-propre qui chez certaines gens prennent une importance exceptionnelle : un serviteur jusque-là fidèle, scrupuleux même, se bute rapidement devant une observation désobligeante. Non point que nous songions à dénier au chef d’industrie le droit de faire constater à son subordonné l’erreur dans laquelle il est tombé, la méprise qu’il vient de commettre, la faute qu’il n’a su éviter. Nous voulons dire qu’il y a la manière, le temps et le lieu pour « parler au coupable ». Une observation n’est utile que si elle vient à propos, et si elle permet à l’intéressé de tirer