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Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/478

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« Le libraire au Lecteur : Seulement je t’advertiray que comme ce livre fut imprimé à Paris l’an 1548 (qui est la dernière édition), fort mal correct et ayant beaucoup de dictions et phrases bien esloignées de la naifveté et pureté de nostre langue françoise, par l’advis de quelques uns de mes bons amys je l’ay faict et diligemment revoir, et aiant ainsi faict oster les faultes les plus signalees de l’impression, je l’ay faict parler françois un peu plus proprement qu’il ne faisoit auparavant. »

Aussi bien, si François Ier, en 1539, avait pu, à la faveur des luttes qui s’élevèrent alors entre maîtres et compagnons, être induit en erreur, il n’en fut pas de même pour Henri II. Peut-être plus clairvoyant, peut-être mieux conseillé, ce roi, à l’occasion de l’octroi d’un privilège à Jean Saugrain, libraire à Lyon, ne craignait pas d’écrire en 1558 « Nous avons entendu que par la négligence et peu de soing des libraires et imprimeurs de nostre ville de Lyon, qui impriment et font imprimer noz ecdictz, ordonnances et lettres patentes et closes, que nous envoyons audict Lyon,… il advient souvent que la pluspart sont mal imprimeez et ordinairement esgareez sans qu’on en puisse retrouver audict Lyon… »


À l’exemple du roi, l’opinion publique n’imputait point au correcteur seul les erreurs qui parfois déparaient les plus belles éditions. Avec Érasme, nombre de lettrés se plaignaient amèrement de l’esprit de lucre qui seul animait trop souvent libraires et imprimeurs. Aussi Ange Roccha, dans sa Dissertation sur les origines de l’Imprimerie, pouvait écrire avec juste raison : Utcumque autem sit, Typographia, non solum a nobilibus et eruditis viris, ac ditissimis quidem, fuit inventa, sed etiam ab hujus generis hominibus diu exculta. Hac autem tempestate, in qua per totum fere terrarum orbem exercetur, vilissimus quisque, perpaucis exceptis, egenus præterea nulliusque eruditionis homunculus, eam illotis tractat manibus, spe tantum lucri, aut mercaturæ exercendæ gratia, ductus. Hinc factum est, ut soli fere mercatores, quorum multi nullum norunt litterarum elementum, pauperrimis hanc artem hominibus exercendam committant, quæstum inde omnem desumentes, et non nisi labores litterarum concinnatoribus, qui et compositores dicuntur, nec non iis qui prælo præsunt, et torculares vocitantur, relinquentes. Correctores insuper, vel satis mediocriter eruditi, ob tenuissimam mercedem ad corrigendi artem eliguntur ; vel, si eruditi sunt, accurati esse