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Page:Brossard - Correcteur typographe, 1934.djvu/135

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ger les pages de distribution, de surveiller leur travail à mesure de sa confection, et de concilier leurs intérêts avec ceux de l’établissement qui l’occupe[1].

La mission du metteur en pages est ainsi fort complexe ; pour être remplie comme elle doit l’être, elle exige un savoir typographique aussi grand que possible.

Peut-être n’est-il pas dès lors hors de propos de dire ici quelques mots sur le rôle du metteur en pages : chargé d’une fonction d’importance capitale, celui-ci est l’architecte, l’artisan qui édifiera et mènera à bonne fin, dans les meilleures conditions, la construction de cette œuvre d’art qu’est la confection d’un livre, au cours de laquelle il lui faudra se conformer aux règles de l’art, satisfaire le client et sauvegarder les intérêts du patron.

Le poste de metteur est l’un des échelons par lesquels doit passer presque toujours le futur prote ; souvent, dans les petites maisons, metteur en pages et prote ne font qu’un sous le nom de prote à tablier. Aussi l’ouvrier qui aspire à l’emploi de metteur ou veut remplir cette fonction avec l’autorité nécessaire doit, ainsi que l’affirme H. Fournier, s’efforcer d’acquérir des connaissances professionnelles complètes, étudier minutieusement les règles typographiques et ne pas rester ankylosé dans l’acquit de connaissances superficielles.

Combien s’intitulent metteurs en pages — alors qu’ils ignorent tout de cette fonction — parce qu’ils ont poussé sur une galée des lignes et mis quelques pages sur longueur. Combien d’autres même, qui tiennent une réglette depuis un certain temps, depuis de longs mois peut-être, n’en restent pas moins des metteurs mie de pain, parce qu’ils se contentent d’être passivement des sortes de machines à répartir la copie et à réunir des paquets, sans chercher à être autre chose. Peut-on s’étonner dès lors de voir ceux-ci embarrassés devant la moindre difficulté ou n’aboutissant qu’au baroque et à l’incohérent, lorsqu’ils composent un titre, une couverture, montent un tableau ou doivent élucider une question scabreuse. Nombre d’entre eux ont cependant des manuels à leur disposition et souvent aussi des publications techniques, qu’ils n’ouvrent guère, malheureusement, et qu’ils délaissent aisément pour courir à d’autres sujets plus inutiles. Chaque jour, des spécimens leur passent sous les yeux : romans dont la lecture les captive, volumes exposés aux devantures des libraires, imprimés de tous genres distribués ici et là. Alors que toutes ces choses devraient être l’objet d’une comparaison, d’un examen plus ou moins attentif selon leur nature, suffisant toutefois pour en discerner les

  1. H. Fournier, Traité de la Typographie, 4e éd., p. 103.