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Page:Brunet - Les hypocrites (1) - La folle expérience de Philippe, 1945.pdf/123

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LA FOLLE EXPÉRIENCE

L’autre commençait :

Quand bien même tu t’en irais,
Est-ce que cela changerait
Un atome au cher problème ?
Tu m’aimes, je crois, et je t’aime,
Quand bien même tu t’en irais,
Chère, tu ne réussirais,
Qu’à créer mille et un regrets,
Dans le sillage de ta fuite,
Et puis, je pleurerais ensuite…

— Donnez-moi votre poème, que je relise.

— Je sais qu’il n’est pas parfait, mais j’aime tellement les vers…

Philippe se penchait sur la feuille. Il feignait de lire et cherchait ce qu’il dirait : il voulait des mots frappants, émouvants. Ce n’était pas seulement l’ivresse, il devinait toute une histoire sous ces vers, il la faisait déjà, il en était si content qu’il s’apprêtait à la dire à celui qui en était le héros.

Mais Philippe ne put résister à commencer par une critique de sources, sa vanité y était prise :

— Évidemment, vous avez lu Paul Géraldy…

— J’ai lu Toi et moi, mais en passant, seulement, ce sont d’autres poètes que je lis le plus souvent.

– La forme, la manière de Géraldy apparaissent tout de suite dans vos vers…

— Je pensais plutôt à Marceline Desbordes-Valmore, et je craignais de l’imiter de trop près…

Philippe était désarçonné, comme il lui arri-